Bonjour,
Je m’appelle Steven DAHMS-DUC, j’ai 18 ans et je vis à Colmar.
Aujourd’hui, je souhaite prendre la parole sur une partie de mon histoire, celle de mon passage par l’Aide Sociale à l’Enfance.
Il n’est pas toujours facile d’en parler, mais je pense qu’aujourd’hui il est grand temps, parce que cela reflète des réalités que beaucoup de jeunes comme moi vivent au quotidien.
L’Aide Sociale à l’Enfance est un service qui m’a tendu la main, je le reconnais, à un moment où tout semblait s’effondrer.
Mon éducatrice m’a soutenu quand les choses devenaient compliquées, que ce soit à l’école, à la maison, ou ailleurs en intervenant, cependant majoritairement à domicile.
Néanmoins, il y a un point qui m’a toujours inquiété : tout s’arrête brutalement quand on souffle ses 18 bougies.
C’est comme si, du jour au lendemain, on devait être prêt à affronter la vie tout seul, sans filet.
Je me souviens encore de ce mélange de peur et de confusion à l’approche de ma majorité, notamment lorsque celle-ci m’a dit que mon suivi s’arrêterait.
Le ressenti que l’on peut avoir à ce moment précis peut être caractérisé, si je puis me permettre, par une claque.
Et cette claque, Mesdames et Messieurs, de nombreux jeunes l’ont sentie.
À 18 ans, on a encore tellement à apprendre, et pourtant, on nous demande de porter le poids de décisions et de responsabilités qui semblent bien trop grandes pour nous.
En effet, si mon éducatrice qui me suivait dans le cadre de mon placement n’avait pas connu la Touline d’Apprentis d’Auteuil, aujourd’hui, je n’aurais eu personne pour m’aider et vous n’auriez pas pu entendre mon discours, qui se veut aussi être un témoignage en honneur à l’ensemble des jeunes qui le sont, mais aussi, également, à la loi Taquet, qui, quant à elle, doit être préservée et appliquée.
Je suis convaincu qu’on pourrait faire les choses différemment.
Pourquoi ne pas prolonger cet accompagnement jusqu’à 25 ans ?
Comme vous le savez, en France, une personne ayant fini ses études, dans le cas où tout se passe bien, quitte le domicile vers l’âge de 25 ans dans l’objectif de construire sa vie.
Ce simple geste pourrait changer la vie de tellement de jeunes, leur permettre de s’insérer doucement dans la vie adulte, sans avoir l’impression de devoir tout affronter d’un seul coup.
Je crois aussi qu’il faudrait que les juges, ceux qui décident des placements, soient mieux informés sur les dispositifs qui existent.
Chaque situation est unique, et il faudrait pouvoir adapter les dispositifs à chaque parcours, pour éviter que certains se retrouvent dans des impasses.
De surcroît, il y a cet aspect psychologique qu’on oublie trop souvent.
Être placé, ce n’est pas juste un changement d’environnement ; c’est un bouleversement total.
On est déraciné, on se pose des millions de questions, on se sent souvent seul.
Lorsque nous sommes mineurs, nous avons accès à certains dispositifs de suivi psychologique comme le CMPP et la PIJ.
Mais, malheureusement, une fois 18 ans, nous n’y sommes plus éligibles.
Nous cherchons à avoir des suivis, mais les délais d’attente sont, comme vous le savez, trop longs.
Ce qui nous amène à nous orienter vers des structures en libéral où les soins ne sont pas pris en charge, ce qui est problématique, notamment, lorsque l’on sait qu’à 18 ans, beaucoup sont encore en poursuite de leurs études, donc en précarité.
Si une aide psychologique était incluse dans ce dispositif, beaucoup pourraient être aidés comme ils le souhaiteraient.
Cela donnerait aux jeunes un espace pour parler, pour se sentir écoutés, et surtout pour alerter si quelque chose ne va pas.
Je partage mon discours, mais aussi, comme je vous l’ai dit, il se veut être un témoignage avec l’espoir que ces idées soient entendues.
Parce qu’au fond, ce n’est pas juste mon histoire ; c’est celle de milliers de jeunes qui, comme moi, essaient de trouver leur place dans une société qui, parfois, leur tourne le dos trop tôt.
J’espère vraiment qu’un jour, ces changements verront le jour, pour qu’aucun jeune ne se sente abandonné à un moment où il aurait encore tant besoin d’aide.